Cet article paraît à l’occasion de la sortie du livre Le Sens de la tech, publié le 26 mai 2023 chez Philosophie magazine éditeur. Retrouvez le sommaire et l’ensemble des articles extraits de cet ouvrage sur le site de Philonomist. Pour commander le livre, c’est par ici !
Chère lectrice, cher lecteur,
Lorsque j’étais petite, j’appelais l’horloge parlante de manière compulsive : pour entendre sa voix, tout simplement. Plus tard, je me pris de passion pour le Minitel. Quoi de plus enthousiasmant que cet objet qui répondait à mes requêtes ? Aujourd’hui, je pense avec nostalgie à ces machines oubliées. Et je ne suis pas la seule : récemment, des passionnés ont développé un dispositif pour ressusciter de vieux Minitel en les connectant au réseau Wi-Fi, permettant ainsi aux coquins des années 80 de composer à nouveau le 3615 Ulla. À l’époque, l’irruption de nouvelles technologies dans la sphère domestique ne provoquait pas la frayeur. On craignait la bombe atomique, mais pas les petits robots que développaient les Japonais (comme ce petit chien que m’avait ramené mon oncle, dont je ne sais plus ce qu’il savait faire à part aboyer et remuer les oreilles). Aujourd’hui, l’arrivée de nouveautés comme les assistants vocaux ou le métavers suscitent tant la fascination que la méfiance. À tort ou à raison ?
“Face aux nouvelles technologies, nous avons le sentiment d’être à l’aube d’une révolution anthropologique”
Le propre des innovations, c’est qu’on les oublie. Soit parce qu’elles sont tombées en désuétude, soit parce que leur usage s’est imposé au point qu’elles se sont fondues dans le décor. On peine à se ressouvenir de ses échanges sur MSN, Second Life ou Chatroulette, tout en éprouvant des difficultés à se remémorer la vie d’avant Internet. Qu’en sera-t-il de ChatGPT ? Il est probable que nous ressentirons un jour une même sympathie teintée de pitié pour cet outil qui nous semblera terriblement daté, tout en admettant que nous ne pouvons plus fonctionner au quotidien sans l’aide de l’intelligence artificielle. En attendant, nous avons beau chercher à prendre de la distance, l’inquiétude est bien là : face aux nouvelles technologies, nous avons le sentiment d’être à l’aube d’une révolution anthropologique. Le smartphone et les réseaux sociaux ont déjà bouleversé nos existences : qu’en feront le deep learning et les objets connectés ? L’IA décuplera-t-elle nos capacités ou bien nous rendra-t-elle stupides ? Sera-t-elle amenée à dépasser l’intelligence humaine ? La technologie nous aidera-t-elle à faire face au changement climatique ou, au contraire, ne fera-t-elle que l’aggraver ? Il est tentant, face à de tels enjeux, de se réfugier dans des attitudes extrêmes. D’opter qui pour une technophobie viscérale, qui pour un technosolutionnisme béat.
C’est pour sortir de cet antagonisme que nous avons organisé une série de dialogues entre penseurs et dirigeants, qui débattent sur l’impact qu’ont les nouvelles technologies sur nos vies. Ces échanges sont réunis dans un livre, Le Sens de la tech, qui paraît le 26 mai 2023 en librairie.
Vous y trouverez des réflexions originales sur la manière dont les innovations récentes et à venir sont amenées à bouleverser des domaines aussi variés que le travail, la mobilité, la souveraineté ou encore la formation de nos cerveaux, au fil de dialogues réunissant des intellectuels et des décideurs de premier plan, comme la philosophe Julia de Funès et le patron d’Adecco Christophe Catoir ; le géographe Michel Lussault et l’ex-PDG de la RATP Catherine Guillouard ; la philosophe Catherine Malabou et le président de Polytechnique Éric Labaye ; le spécialiste du numérique Jean-Gabriel Ganascia et le PDG de Thales Patrice Caine ; le philosophe Luc de Brabandere et la femme d’affaires Patricia Barbizet ; la spécialiste de l’IA Laurence Devillers et la présidente du conseil d’administration de Legrand Angeles Garcia-Poveda.
Chaque semaine, nous présenterons l’un de ces dialogues dans cette newsletter. Pour ouvrir cette série de publications, nous vous proposons de découvrir la préface que j’ai rédigée pour cet ouvrage, consacrée à l’épineuse question du lien entre progrès moral et technique ; puis le premier de ces échanges inédits, dans lequel l’anthropologue Pascal Picq et Olivier Girard, président d’Accenture France et Benelux, soulèvent les grands enjeux de la révolution technologique à l’œuvre. Enfin nous avons décidé, pour ouvrir la réflexion et fêter la sortie de ce livre, d’interroger un interlocuteur particulièrement bien placé pour nous éclairer sur l’avenir de la tech : ChatGPT. Ses réponses sont commentées par Pierre Cassou-Noguès, philosophe et spécialiste de nos relations aux machines.
L’ensemble des publications issues de cet ouvrage est à retrouver ici, et vous pouvez également commander le livre dès à présent.
Bonne lecture,
Anne-Sophie Moreau
