Une révolution bouleverse les open spaces : finis les bureaux attitrés, les immuables photos de famille posées sur la table. Avec le flex office, on occupe une place nouvelle chaque jour. Mais pouvons-nous vivre et travailler sans nous enraciner dans un endroit ? Pourquoi pas, se demande Michel Eltchaninoff.
Avant, Léa pouvait commencer sa journée en pilote automatique – surtout avant le café. Elle rejoignait son bureau sans réfléchir : au milieu de l’open space, sur la gauche, tout près de la fenêtre en face de sa collègue préférée. Elle répondait au sourire de ses enfants, dont la photo trônait sur la table, à côté de son vieux mug Élisabeth II, de ses dossiers, de son petit désordre personnel. Mais depuis deux mois, le réveil est moins doux. Elle doit trouver une place libre car elle n’a plus son bureau à elle. Déjà pas mal de postes sont pris. Il est à peine 9 heures et des dossiers sont posés, histoire d’occuper le terrain. Le syndrome de la serviette de plage, soupire Léa. Tout ça pour ne pas être trop loin du boss ! Ce qui l’énerve le plus, c’est que les bureaux proches de la lumière du jour sont également occupés. Dépitée, elle choisit une place au hasard. Et avec une légère angoisse : pourvu qu’elle ne se retrouve pas avec Jean-Pierre, qui parle toujours trop fort. Et surtout pas avec Agnès… Mais bon, pas de panique, car au bout de deux semaines, tout le monde s’assoit à la même place.
Le flex office, comme toutes les nouveautés, fait grincer des dents. Selon un sondage post-Covid, seulement 16 % des entreprises l’ont adopté. 55 % envisagent d’y passer rapidement. L’une des raisons, décisive, est de réduire les coûts, notamment immobiliers, alors que le télétravail est entré dans les mœurs. Mais pour l’instant, seul un tiers des collaborateurs en est satisfait. Pourtant, les avantages ne sont pas que financiers. Comment lutter contre la routine, la création de baronnies ou de clubs interdits aux juniors, favoriser de nouvelles rencontres, stimuler des échanges inattendus, sinon en proposant ce grand jeu de chaises musicales ? Les managers tentent de convaincre les collaborateurs des vertus du flex office, alors que ces derniers traînent parfois des pieds. D’autant que cette organisation inédite accompagne souvent un déménagement, parfois vécu comme un minitrauma.
Prenons un peu de recul. Voyons à quelle logique correspond ce nouveau nomadisme, et si le déracinement provoqué est si dramatique qu’on le pense.
“Le flex office s’inscrit dans un vaste mouvement de civilisation : personne n’a plus de place permanente dans l’univers”
Reste à ta place !
Le flex office s’inscrit dans un vaste mouvement de civilisation, qui remonte à plusieurs siècles. Il nous …
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