Paris, le 17 janvier 2024. Le Premier ministre Gabriel Attal au Sénat © Jeanne Accorsini/Sipa

 

En France, un homme ouvertement homosexuel peut devenir Premier ministre : la nomination de Gabriel Attal le montre. La preuve d’une acceptation de l’homosexualité dans la vie publique et professionnelle qui pourrait réjouir la communauté LGBT. Pourtant, plusieurs figures de ce mouvement ont dénoncé cette « normalisation » de l’homosexualité. Comment le comprendre ?

« Le Premier ministre est gay, mais pas trop. » La formule, signée Mathieu Magnaudeix, journaliste à Mediapart et figure de l’Association des journalistes LGBTQI+ (AJL), a fait mouche. Elle s’inscrit dans un ensemble plus large de réactions – « gay mais pas queer », « pansement gay » – de voix du mouvement LGBT appelant à ne pas se réjouir trop vite de la nomination à Matignon d’un homme pourtant ouvertement homosexuel. Qu’est-ce que cela signifie ? Pourquoi un tel empressement à calmer les ardeurs de ceux qui entendent faire de cette nomination le symbole d’une société qui avance, d’une France qui, désormais, accepte à peu près pleinement l’homosexualité ?

Pour ces quelques personnes, en propulsant le jeune Gabriel Attal à la tête du gouvernement, le président de la République ne ferait finalement rien de plus qu’entériner un autre état de fait : la société accepte les homosexuels à condition que ceux-ci soient « rentrés dans le moule » et qu’ils ne fassent pas trop étalage de qui ils sont – « Tant que l’homosexualité n’est pas “militante”, elle est acceptable », tranche ainsi Magnaudeix. « Les faits montrent qu’un Premier ministre gay, c’est désormais possible en France. À condition toutefois qu’il ne revendique pas grand-chose sur les sujets LGBTQI+. Et qu’on n’en sache pas trop non plus sur sa vie privée. »

 

À droite toute

Si Gabriel Attal est donc « gay, mais pas trop », c’est parce qu’il ne politise pas son identité. Il n’est pas spécialement militant sur la question des droits des homosexuels et il s’est éloigné d’une gauche sensible à ces questions. Parfaitement inséré dans la société telle qu’elle est, il serait en réalité le symbole chimiquement pur de la « normalisation » d’une identité jadis subversive et qui tend à l’être de moins en moins. Un état de fait que déplorait déjà en 2012 Didier Lestrade, figure cofondatrice de l’association Act Up, dans son essai Pourquoi les gays sont passés à droite (Éditions du Seuil, 2012), et que confirment les récentes recherches sur le phénomène de « l’homonationalisme » dont a notamment traité l’essayiste Pablo Stefanoni dans La Rébellion est-elle passée à droite ? (La Découverte, 2022). Si le nombre de cadres gays du Rassemblement national (Steeve Briois, Sébastien Chenu, Julien Odoul) a ces dernières années rendu patent ce dernier phénomène, ce sont surtout les votes qui sont parlants.

 

“Les homosexuels votent désormais de la même façon que les hétérosexuels, si ce n’est davantage à droite”

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