Quel bruit fait votre porte-monnaie ? Un bruit sourd, plein à craquer de billets ? Un petit tintement timide, avec deux pièces jaunes qui se battent en duel ? Ou carrément un silence de mort ? Si vous êtes de la troisième école, bravo : apparemment, vous êtes l’humain du futur. Dans nos usages quotidiens, l’argent liquide tend à disparaître. États, banques, acteurs privés, et nous-mêmes citoyens : cette mutation nous concerne tous. Pour le meilleur… ou pour le pire ?

L’argent liquide va disparaître, et c’est tant mieux ! C’est en tout cas ce que défend sans relâche depuis 2016 l’ancien économiste en chef du Fonds monétaire international (FMI) Kenneth Rogoff dans son best-seller sobrement intitulé « La malédiction de l’argent liquide. Comment les grosses coupures favorisent la criminalité et l’évasion fiscale et limitent la politique monétaire » (The Curse of Cash, 2016). L’auteur y plaide pour une suppression progressive des grosses, puis des moyennes et des petites coupures dans les économies les plus développées. « Le gradualisme permet d’éviter les perturbations excessives et donne aux institutions et aux individus le temps de s’adapter », justifie-t-il.

 

“Environ 90 % la monnaie américaine présente des traces de cocaïne”

 

Déjà, le cash serait le mode de transaction privilégié pour les activités illicites (drogue, racket, corruption, traite des êtres humains, blanchiment d’argent, etc.). En 2009, une association de chimistes américains a montré qu’environ 90 % de la monnaie américaine présentait des traces de cocaïne. Idem pour les dollars canadiens, juste devant la monnaie brésilienne (80 % de traces de cocaïne), très loin devant les billets chinois et japonais (respectivement à 20 % et 12 % de cocaïne).

Ensuite, éliminer l’argent liquide serait un facteur de stabilité macroéconomique et de contrôle des masses monétaires. Tant que les citoyens ont le choix entre retirer des coupures ou laisser leur argent à la banque, il est quasiment impossible d’imposer aux banques d’exercer des taux d’intérêt négatifs sur les comptes de dépôt : les gens retireraient tout de suite leur argent de la banque pour éviter qu’il ne perde en valeur. La fin du cash permettrait de contrôler entièrement les taux et la valeur des monnaies, ce qui éviterait les effets d’emballement et donnerait aux pouvoirs publics plus de leviers d’action pour enrayer une spirale déflationniste ou au contraire inflationniste.

 

Utopie ou réalité ?

L’utopie de Kenneth Rogoff est déjà presque le quotidien du Danemark, dont la plus grosse banque n’a plus que deux distributeurs de monnaie, ce qui rend quasiment impossible le retrait de couronnes danoises. Le résultat ne s’est pas fait attendre : début 2023, les journaux titraient avec fierté que le pays venait d’enregistrer sa première année sans aucun braquage de banque. En Suède, même son de cloche. Dès 2012, les banques du pays ont encouragé le paiement par applications mobiles sécurisées, avec succès : la population, confiante dans ses institutions, ouverte à l’innovation et très bien couverte par la 3G, se montre plutôt convaincue. Résultat ? Les billets ne représentent aujourd’hui plus que 1 % de la masse monétaire de la couronne suédoise, et 60 % des banques refusent les dépôts d’espèces.

Mais ces bons élèv…

Il vous reste 75% à lire
Profitez de 7 jours gratuits sans engagement ou abonnez-vous
Abonnez-vous pour accéder à l'intégralité des contenus du site et rejoindre la communauté des Philonomistes. Découvrir les offres d’abonnement
Abonnement gratuit 7 jours
(sans coordonnées bancaires)
Accédez gratuitement à l'intégralité du site.

Votre entreprise vous a abonné(e) à Philonomist ?
Cliquez sur le bouton ci-dessous.